Nouveau en Russie : sous-marin de classe Khabarovsk

Lorsque la Russie s’est engagée sur la voie de l’introduction d’une toute nouvelle catégorie d’armes nucléaires, la gigantesque torpille-drone Poséidon, elle a dû créer une toute nouvelle classe de sous-marins pour la transporter. Dans un mouvement qui rappelle la guerre froide, la marine russe construit tranquillement une flotte de ces sous-marins. Le premier bateau dédié, Khabarovsk, devrait être lancé l’année prochaine.

Poséidon (GRAU: 2м39, OTAN: KANYON) a été décrite par le gouvernement américain comme une torpille autonome à énergie nucléaire intercontinentale. Il n’y a pas de désignation pour le nouveau type de sous-marin devant la mettre en oeuvre. Ce ne sont pas des SSN ou des SSGN (sous-marins d’attaque ou sous-missiles de croisière). Ils tiennent du SNLE (SSBN) mais sans le «B». À titre provisoire, nous pouvons les appeler SSDN (sous-marin nucléaire mettant en oeuvre des drons).

Les capacités uniques de cette arme pourraient influencer la nature de la guerre sous-marine. À mon avis, ces sous-marins sont susceptibles d’être le sous-marin déterminant des années 2020 car ils représentent un adversaire nouveau et difficile.

Il est peu probable que d’autres marines l’imitent, mais elles voudront la contrer. Le jeu sous-marin du chat et de la souris où les SNA de l’US Navy et de la Royal Navy traquent les Russes pourrait être revigoré. Voici une nouvelle guerre froide dans l’Arctique, l’Atlantique Nord et le Pacifique Nord.

La Russie a réussi à garder secrets de nombreux détails sur le prochain de ces sous-marins spéciaux, Khabarovsk. On en sait relativement peu sur ce grand bateau à armement nucléaire, contrairement aux sous-marins occidentaux. Son lancement est donc attendu avec impatience par les observateurs de la défense. Il est en cours de construction dans le hall de construction 1 du chantier Sevmash à Severodvinsk, dans le nord de l’Arctique russe. On s’attend maintenant à ce qu’il soit lancé au printemps / été 2020. Ne retenons pas notre souffle pour autant : le lancement a déjà été retardé des années.

Le Khabarovsk n’est pas le seul sous-marin conçu pour transporter Poséidon. Au total, il y aura quatre bateaux de trois classes :

  • Pr.09851 Khabarovsk – sous-marin nucléaire armé de six armes Poséidon
  • Pr.09852 Belgorod – un sous-marin OSCAR-II STRETCH unique lancé le 23 avril 2019. Armé de six Poséidon mais également conçu pour accueillir des mini sous-marins de plongée profonde pour la guerre des fonds marins
  • Pr.09853 – Deux porteurs Poséidon consécutifs, probablement issus de la conception de Khabarovsk

Que sait-on du Khabarovsk?

L’existence du sous-marin «Projet 08951» n’a jamais été un secret, mais on en parle à peine dans les sources russes. Peu à peu, à partir des quelques sources et d’analyses à l’ancienne, une image s’est dégagée.

Le 9 novembre 2015, la chaîne de télévision russe NTV a «  divulgué  » l’arme Poséidon, alors étiquetée Status-6. Le Khabarovsk vu est en haut à droite. La représentation de Belgorod, à gauche, s’est avérée généralement exacte bien que le bord d’attaque du massif soit différent.

Le Khabarovsk partagera probablement de nombreux éléments du SNLE du type BOREI / BOREI-II (SNLE). Cela devrait réduire les coûts et le rendre également plus furtif que de nombreux autres sous-marins en service dans la marine russe. La moitié avant sera occupée par les six énormes torpilles-drones Poséidon.

Le Poséidon, également connu sous le nom de «Statut-6» et la dénomination OTAN «Kanyon», est conçu pour être à propulsion et à armement nucléaires, ce qui lui confère une portée pratiquement illimitée. Cela constituerait donc une menace pour les villes côtières telles que New York et Los Angeles. Le ministère russe de la Défense la décrit comme une arme polyvalente et suggère qu’elle pourrait également viser les groupes aéronavals de la marine américaine.

Revoir la guerre sous-marine

À moins qu’il n’y ait un changement dans les plans russes, le Khabarovsk sera probablement un nouveau centre d’intérêt de la guerre anti-sous-marine occidentale pour la prochaine décennie. En particulier pour l’US Navy et la Royal Navy, dont les flottes de sous-marins nucléaires ont une longue tradition de traque des bateaux russes. Les bateaux armés de Poséidon présenteront de nouveaux défis à ces chasseurs.

Construire de nouvelles armes pour intercepter le Poséidon prendra du temps. Sa vitesse (70 nœuds estimés) et son immersion maximale (~ 1 000 mètres / 3 000 pieds) pourraient la rendre pratiquement invulnérable face à la génération actuelle des torpilles en service. Il est possible que les torpilles Mk.48 ADCAP (Advanced Capability) de la marine américaine et Spearfish de la Royal Navy puissent l’atteindre. I est néanmoins possible que de nouvelles torpilles ‘adaptées à ces nouvelles conditions ( plus vite, plus bas et sans doute plus grand) de nouvelles torpilles soient déjà en cours d’étude.

Et peut-être que cela fait partie de la logique derrière Poséidon. La contrer coûtera à l’Occident d’énormes sommes d’argent. Et cela signifiera des compromis en cours de route. D’autres priorités pourraient être écartées pour faire place à la lutte contre Poséidon, ce qui pourrait affaiblir les capacités en d’autres domaines.

Aujourd’hui, peu en Occident ont entendu parler de ce sous-marin. Et pourtant c’est celui qui est à surveiller.

source : HI Sutton